Face à la montée des incertitudes politiques et économiques, Goldman Sachs relève ses prévisions pour le cours de l’or. La banque d’investissement table désormais sur un prix de 3 700 dollars l’once d’ici fin décembre, soit une hausse de 15 % par rapport à sa précédente estimation. Ce nouvel objectif reflète une demande croissante des banques centrales et des investisseurs en quête de valeurs refuges.
Depuis le début de l’année, le métal jaune a déjà progressé de 23 %, franchissant pour la première fois la barre des 3 200 dollars l’once. Cette envolée est alimentée par plusieurs facteurs puissants : achats soutenus des banques centrales, afflux de capitaux vers les ETF adossés à l’or, tensions commerciales ravivées sous l’impulsion de Donald Trump, et retour du spectre de la stagflation. Par ailleurs, Goldman Sachs estime à 45 % la probabilité d’une récession aux États-Unis — un chiffre que certains gestionnaires d’actifs portent à 50 %.
Des achats records des banques centrales
Dans ce contexte, Goldman Sachs a revu à la hausse ses projections sur les achats d’or par les banques centrales : 80 tonnes par mois, contre 70 précédemment. C’est près de cinq fois la moyenne observée avant 2022, qui s’établissait à seulement 17 tonnes. Ce rythme d’accumulation est inédit.
Cette frénésie s’explique par le statut unique de l’or : actif tangible, non soumis aux droits de douane, indépendant des chaînes logistiques mondiales, et doté d’une valeur universelle. De plus, des banques centrales comme celles de la Chine, de l’Inde ou d’Europe de l’Est cherchent à se prémunir contre un affaiblissement du dollar et une inflation persistante.
Récession, tensions géopolitiques et course à la sécurité
La nervosité sur les marchés ne faiblit pas. La guerre commerciale relancée par Donald Trump bouleverse les équilibres mondiaux : nouveaux droits de douane contre la Chine et le Canada, tensions avec l’Union européenne, et mesures protectionnistes en cascade. Si l’or a connu une légère correction en avril — retombant temporairement sous les 3 000 dollars — il a rapidement rebondi, porté par la demande.
Parallèlement, les tensions au Moyen-Orient et en Europe de l’Est continuent d’alimenter la quête d’actifs refuges. Les investisseurs institutionnels réinjectent massivement des capitaux dans les ETF liés à l’or, un mouvement qui pourrait s’intensifier en cas de nouvelle crise.
Les marchés anticipent désormais jusqu’à quatre baisses de taux par la Fed en 2025, face à une croissance jugée nulle, voire négative, et une inflation toujours élevée, autour de 4 %. En Europe, des prévisions similaires laissent entrevoir trois à quatre baisses. Autant d’éléments susceptibles d’affaiblir le dollar et de renforcer l’attrait de l’or.
Des scénarios multiples, mais une tendance claire
Selon Goldman Sachs, l’évolution du prix de l’or dépendra essentiellement du rythme des achats des banques centrales et de la profondeur de la récession. Trois scénarios se dessinent :
- 80 tonnes achetées par mois : 3 700 $ l’once fin 2025
- 100 tonnes + récession sévère : jusqu’à 3 880 $ l’once
- Reprise de la croissance : repli possible vers 3 550 $
Dans tous les cas, la trajectoire demeure haussière. À titre de comparaison, l’once valait moins de 500 dollars en 2005. Elle dépasse aujourd’hui les 3 200 dollars — soit une multiplication par plus de six en deux décennies.
Cependant, un emballement trop rapide pourrait freiner certains acheteurs, notamment les banques centrales, prudentes face à des prix jugés trop élevés. Le World Gold Council évoque également une possible pénurie de liquidités, dans un contexte de volatilité extrême où même les actifs les plus solides peuvent être vendus en urgence.
UBS et Commerzbank relèvent également leurs prévisions pour le cours de l’or
Goldman Sachs n’est pas la seule à anticiper un envol de l’or. Vendredi, UBS a également revu à la hausse sa prévision, tablant désormais sur un cours à 3 500 dollars l’once en 2025. Pour Joni Teves, stratégiste chez UBS, « l’argument en faveur de l’or n’a jamais été aussi solide, dans un contexte de tensions commerciales, de croissance atone, d’inflation persistante et d’incertitudes géopolitiques. »
De son côté, Commerzbank a ajusté sa prévision moyenne pour la fin de l’année, la portant de 2 850 à 3 000 dollars, en se basant notamment sur les 345,5 milliards de dollars d’actifs détenus par les ETF or à fin mars — un niveau record.